Médiation judiciaire et profils toxiques : une solution inadaptée face aux Pervers Narcissiques ?

Le système judiciaire français encourage de plus en plus le recours à la médiation pour résoudre les conflits, notamment familiaux. Cette approche vise à désengorger les tribunaux et à favoriser des solutions amiables. Cependant, cette tendance soulève des inquiétudes lorsqu’elle est appliquée à des situations impliquant des individus manipulateurs, tels que les pervers narcissiques. Dans ces cas, la médiation peut non seulement être inefficace, mais aussi dangereuse pour les victimes.

Une montée en puissance de la médiation judiciaire

Depuis quelques années, la médiation judiciaire est de plus en plus intégrée dans le processus judiciaire français. En 2021, 61,5 % des médiations judiciaires se sont conclues par un accord total entre les parties (justice.gouv.fr). Cette évolution est soutenue par des initiatives telles que la création du Conseil national de la médiation (justice.gouv.fr).

Pourtant, cette dynamique suscite des réserves chez certains avocats.

🎙 Maître Tristan Berger, avocat à la cour et docteur en droit, met en garde :
« En droit de la famille, à l’école ou dans le travail, la médiation est encouragée. Elle peut désamorcer les tensions… à condition que toutes les parties soient de bonne foi. Mais face à une personne toxique, la médiation peut devenir un terrain de manipulation, où l’apparence d’ouverture cache une stratégie d’influence. »
(Source)

Les limites de la médiation face aux pervers narcissiques

La médiation repose sur un équilibre dans la communication. Mais face à un pervers narcissique, ce principe est illusoire. Ces personnes utilisent la médiation comme un outil de domination supplémentaire.

La confrontation directe, inhérente à la médiation, peut :

  • raviver des traumatismes,
  • renforcer l’emprise du manipulateur,
  • et mettre la victime en position d’échec.

Selon le psychologue Pascal Couderc, sur pervers-narcissique.com, la médiation devient alors un théâtre de manipulation, loin de toute tentative sincère de résolution.

Une justice qui peine à protéger les victimes

Le recours systématique à la médiation peut être perçu par les victimes comme un désengagement de la justice. Cette problématique a déjà été soulignée dans cet article sur les défaillances du système judiciaire face aux profils toxiques.

Quand un juge oriente une affaire vers la médiation sans analyser les rapports de force, il laisse la victime sans véritable filet.

Cela peut :

  • renforcer l’impunité du manipulateur,
  • affaiblir la crédibilité du système judiciaire,
  • et prolonger l’emprise psychologique sur la victime.

Il est donc indispensable de former les magistrats à la détection des profils toxiques et à évaluer les risques avant d’imposer une médiation.

Une perspective psychanalytique : l’absence du tiers séparateur

Certains auteurs en psychanalyse soulignent que les pervers narcissiques n’ont pas intégré la fonction du « tiers séparateur » – souvent représentée par le père – durant leur développement.

Selon certains professionnels, cette carence structurante expliquerait leur :

  • refus de toute limite,
  • besoin constant de contrôle,
  • et incapacité à reconnaître l’altérité.

Dans ce cadre, négocier ou dialoguer avec un tel profil n’a aucun sens thérapeutique ou judiciaire. Pire, la médiation peut renforcer leurs mécanismes pathologiques.

Conclusion : adapter la justice aux réalités psychologiques

La médiation n’est pas un remède universel. Face à des personnalités pathologiques ou manipulatrices, la justice doit reprendre pleinement son rôle de protection.

Il est crucial de :

  • Former les professionnels à ces réalités psychologiques,
  • Évaluer les dynamiques de pouvoir avant toute médiation,
  • Et prévoir des exceptions claires dans les procédures.

Sans cela, la médiation risque de devenir une arme contre les plus vulnérables.

Pour aller plus loin

Pour approfondir les risques spécifiques liés à la médiation avec des profils manipulateurs, vous pouvez consulter cet article de fond, de la psychologue Christine Calonne :

L’emprise et le contrôle coercitif – Une médiation impossible

1 réflexion sur “Médiation judiciaire et profils toxiques : une solution inadaptée face aux Pervers Narcissiques ?”

  1. Ping : Quand le pervers narcissique accuse les autres d’en être : cas d’inversion accusatoire

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